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La Caricature Provisoire

Trois lithographies bien connues

Cette planche comporte deux parties bien distinctes : d’une part,  le bandeau supérieur et l’entourage, et d’autre part, la partie centrale évoquant la pièce du Mariage de Figaro de Beaumarchais.

Dans le bandeau supérieur, au milieu des roses, figurent les génies reconnus de la littérature et des arts : de gauche à droite, Berlioz, Rossini, Balzac, Janin, Philipon, Delacroix, Soulié, Hugo et Dumas. Au pied de l’entourage formé d’une guirlande épineuse de rosier, on voit, se hissant vers la gloire, les génies inconnus, en la personne de Benjamin à gauche, avec ses pinceaux et sa palette (autoportrait), et à droite d’Albéric Second, jeune auteur, journaliste au Charivari.

On remarque que Rossini, moqueur, tire les cheveux de Berlioz, allusion à une certaine incompréhension entre les deux compositeurs.

Au centre, la deuxième partie de la planche représente la  scène 6 du Mariage de Figaro, à l’acte II,  dite « scène du fauteuil ».

Le mariage de Figaro par Benjamin Roubaud pour La Caricature provisoire

La Caricature provisoire du 18/11/1838
Paris Musées, Maison de Balzac

Le Mariage de Figaro

Grand Opéra de Berlioz Benvenuto Cellini - Benjamin Roubaud pour La Caricature provisoire

Grand Opéra de Berlioz Benvenuto Cellini

Compositeur, chef d’orchestre et critique musical, Hector Berlioz connut des débuts difficiles en France.

Le 10 septembre 1838, la représentation de son opéra Benvenuto Cellini ne reçoit qu’un accueil mitigé. Ce relatif échec est souligné assez cruellement dans la caricature de Benjamin qui résume les critiques faites à cette œuvre du grand compositeur, critiques reprises dans l’article de La Caricature provisoire, signé par Louis Huart, commentant le dessin.

La Caricature provisoire du 01/11/1838
Musée Hector Berlioz – Département de l’Isère

Le mariage de Figaro par Benjamin Roubaud (détail)

Or, la pièce est jouée par les demoiselles, déjà vieillissantes, de la Comédie Française : Mlle Mante (la comtesse Almaviva) a 49 ans, Mlle Mars (Suzanne) a 59 ans, Mlle Anaïs (Chérubin) a 37ans, soit au total 145 ans !

Cette critique orientée trouve son sens dans les propos de Philipon qui écrit dans la revue La Caricature provisoire du 18/11/1838 :

« M de Barray, habitué des spectacles, offre de fournir à La Caricature une série de croquades dramatiques dans lesquelles il fera ressortir les fautes que commettent en ce genre la plupart des théâtres de Paris. Nous verrons ».

Cette planche fut signée « de Barray », pseudonyme éphémère de Benjamin, dans son tirage initial de 1838. Dans un tirage postérieur, elle fut signée « Nimaj » (les 4 dernières lettres, à l’envers, de Benjamin), puis elle fut officiellement attribuée à Benjamin en 1842, par l’éditeur,  lors de sa publication dans « L’Album théâtral ». Attribution aujourd’hui confirmée sur les sites Gallica-BnF et Paris-Musées.

La Caricature provisoire du 23/12/1838
Paris Musée, Maison de Victor Hugo- Paris Guernesey

Dans cette planche, Benjamin reprend un épisode de la bataille entre les romantiques et les classiques.

Fin 1838, Hugo vient de représenter « Ruy Blas » qui connait un échec. Il est chassé du Théâtre Français (le Temple) par Rachel, la célèbre tragédienne debout, à gauche, sur le seuil, qui vient de triompher dans Bajazet de Racine. Hugo s’enfuit vers le Théâtre de la Renaissance, qu’il vient de fonder, accompagné de Dumas et de l’acteur Frédérick Lemaitre (de dos), qui a tenu le  rôle de Ruy Blas. On aperçoit Théophile Gautier, en arrière-plan et également l’actrice Atala de Beauchène dans le rôle de la reine d’Espagne.

Les romantiques chassé du Temple - Benjamin Roubaud pour La Caricature provisoire (Victor Hugo, Alexandre Dumas, Théophile Gautier)

Les Romantiques chassés du Temple

Un spectateur assidu de la vie littéraire et artistique

Figaro doit se marier avec Suzanne, la servante de la comtesse Almaviva, mais le comte Almaviva a des prétentions sur Suzanne.

Pour démasquer ce dernier, avec la complicité de la comtesse, Suzanne lui a donné un rendez-vous
pour lequel, Chérubin, un jeune page, âgé de 15 ans, doit prendre sa place, une fois déguisé.

On voit sur la lithographie la comtesse, assise au centre dans un fauteuil, et Suzanne, debout. Elles viennent de déguiser Chérubin, et Suzanne s’exclame (texte de la légende) « Mais voyez donc ce morveux, comme il est joli en fille ! …….. Voulez-vous bien n’être pas joli comme ça ?»

La caricature raille le décalage entre l’âge supposé des personnages de la pièce Beaumarchais et celui des comédiennes choisies pour l’interpréter. Selon les indications de Beaumarchais, qui sont rappelées juste au-dessous de la légende, la comtesse est âgée de 20 ans, Suzanne de 18 et Chérubin de 15, soit un total de 53 ans.

Grand Opéra de Berlioz Benvenuto Cellini (détail) - Benjamin Roubaud

Ci-après, la légende placée sous l’estrade, qui doit sans doute figurer l’annonce verbale du spectacle :

Rebaptisé Malvenuto Cellini, l’opéra est ramené à une parade de rue, c’est-à-dire une présentation burlesque faite à la porte d’un théâtre, sur des tréteaux, pour engager le public à venir assister au spectacle. Ce genre, apparu au XVIIIe siècle, était encore très prisé à l’époque.

Cette figuration de l’opéra de Berlioz, sous forme de parade, affiche clairement que l’œuvre n’est même pas digne d’être jouée dans une salle de spectacle, mais relève d’un spectacle de rue burlesque, d’où le texte de la légende : « avec pasquinades littéraires » qui vise le livret et « arlequinades musicales », la musique, seule l’ouverture obtenant un réel succès.

La phrase finale de la légende : A la fin de la parade…est une allusion à Benvenuto Cellini, le célèbre  sculpteur-orfèvre italien du 17e siècle.
Bien que non signée, la planche du « Grand Opéra » est formellement attribuée à Benjamin dans le numéro même de La Caricature provisoire où elle est publiée (page 4) et il en sera de même dans les annonces suivantes.