Site à l'initiative de Pierre QUIBLIER et Jean-Paul ROUBAUD

Web-designer : Harold George

Mentions légales

Les caricatures politiques

de la Caricature

"La france traîne son boulet" par Benjamin Roubaud pour La Caricature

La France traîne son boulet, par Benjamin
La Caricature du 27/12/1833.  Paris Musées - Maison de Balzac

Dans cette planche, Benjamin nous montre la France, représentée, sous forme allégorique, par une jeune femme plongée dans un état d’accablement. Un boulet en forme de poire, à la ressemblance du visage de Louis-Philippe, est accroché à sa cheville gauche. Dans cette scène assez pathétique, le roi est présenté comme une entrave au développement du pays. Les deux gardiens dans cette scène du bagne sont les maréchaux Soult  (debout) et Lobau, chef de la Garde nationale (assis).

Commentant cette planche, la revue La Caricature prédit : la France n’est pas condamnée au boulet à perpétuité et tôt ou tard, la liberté le lui détachera.

Grand enterrement du Constitutionnel de Benjamin et Grandville
La Caricature des 16/01/1834 (tirage en noir et blanc) et  06/03/1834 (couleur). Paris-Musées - Maison de Balzac.

"Grand enterrement du Constinutionnel" par Benjamin Roubaud et Grandville pour La Caricature

Cet enfant-là ne marchera jamais seul, par Benjamin
La Caricature du 29/08/1833. Paris Musées - Maison de Balzac.

C’est la première planche de Benjamin (âgé alors de 22 ans) publiée dans La Caricature. Louis-Philippe, figuré en enfant est mené en lisière, devant les fortifications de Paris,  par Talleyrand ministre des Affaires Etrangères.
De face, on voit Guillaume IV, roi du Royaume Uni, avec lequel Talleyrand essaye de négocier un accord pour s’opposer à l’alliance de la Russie, l’Autriche et la Prusse. Guillaume IV regarde Talleyrand avec un sourire moqueur.  Cette planche raille le manque d’autonomie et d’autorité de Louis-Philippe sur la scène européenne.

"Cet enfant-là ne marchera jamais seul" par Benjamin Roubaud pour La Caricature

Un caricaturiste politique sous Louis-Philippe

C’est dans La Caricature que Benjamin fit ses débuts de caricaturiste politique, peu avant d’entrer au Charivari.  D’août 1833, à avril 1835, il dessina dans cette revue 13 caricatures, dont 4 en double format.

Beaucoup de caricatures politiques de la revue n’étant pas signées ou attribuées, il a pu en dessiner d’autres de manière anonyme.

La revue La Caricature constatant un désabonnement massif des lecteurs du journal Le Constitutionnel (soutenant Louis-Philippe), prévoit sa fin prochaine et publie une grande caricature de son enterrement. C’est un sujet de réjouissance pour la presse d’opposition. Cette caricature, très élaborée et d’un dessin soigné, comporte de nombreux personnages : Philipon, en Triboulet, à gauche du cercueil, représente La Caricature. Au premier plan, vers la droite, le personnage au tambour représente Le Charivari. On y trouva aussi les cinq dessinateurs de La Caricature : Benjamin, Daumier, Desperret, Forest et Grandville.

Curieusement, dans la description de la planche, donnée dans le même numéro de la revue La Caricature, la place assignée aux cinq dessinateurs est manifestement fausse.
C’est Desperret, à droite, et non Forest, qui porte le fauteuil à l’Académie, chaise percée au logis;
C’est Benjamin, à gauche, en second plan, et non Grandville qui porte le panneau « articles béotiens »;
C’est Daumier, à gauche, en arrière-plan, et non Benjamin, qui porte le portrait du Constitutionnel, qu’il a lui-même dessiné;
C’est Grandville, à gauche, en tout premier plan ,et non Daumier, qui porte le seau d’encre bénite et les plumes;
C’est Forest, à droite, et non Desperret, qui porte l’encrier en forme de poire.

Portrait de Grandville
Autoportrait de Benjamin Roubaud - Panthéon charivarique
Portrait de Daumier par Benjamin Roubaud - Panthéon charivarique
E. Forest
A. Desperret
GRANDVILLE
par Lassale
Galerie de la presse

Grandville porte un grimoire,
Où du savant trépassé
On voit maint titre de gloire
Sur peau d'âne retracé.

Le tableau d’identification ci-dessous montre avec des flèches rouges la fausse désignation de chaque dessinateur et avec des flèches vertes l’identification réelle.

GRANDVILLE
par Lassale,
Galerie de la presse

Grandville porte un grimoire,
Où du savant trépassé
On voit maint titre de gloire
Sur peau d'âne retracé.

B. ROUBAUD
par Benjamin Roubaud,
Panthéon charivarique

Benjamin, à l'opposite,
Du défunt tient le portrait,

DAUMIER
par Benjamin Roubaud,
Panthéon charivarique

A Daumier l'encre bénite !

E. FOREST
par Daumier,
Bandeau du Charivari

De Forest l'épaule amie
Supporte un siège métis,
Fauteuil à l'académie,
Chaise-persée au logis.

A. DESPERRET
par Daumier,
Bandeau du Charivari

L'encrier à Desperret

Le tableau d’identification ci-dessous montre avec des cercles rouges la fausse désignation de chaque dessinateur et avec des cercles verts l’identification réelle. (cliquez sur les vignettes de chaque dessinateurs pour faire apparaître les cercles).

Verse, verse, verse encore (Scène bachique)
La Caricature du 30 janvier 1834 - Paris-Musées, Maison de Balzac

"Verse, verse, verse encore (scène bachique)" - lithographie par Benjamin Roubaud pour la Caricature du 30 janvier 1834

Cette lithographie est une parodie de la scène traditionnelle tirée de la mythologie : le triomphe de Bacchus. Après avoir conquis les Indes, Bacchus regagne la Grèce, en vainqueur, dans une marche triomphale, sur un char tiré par des tigres.

Dans cette scène, où se conjuguent habilement les références mythologiques et les allusions politiques, on voit Louis- Philippe déguisé en Bacchus ventripotent, à cheval sur un coq symbolisant la France. Le roi, une coupe à la main, déguste le jus de raisin issu de la « vendange financière ». En effet, en cette période, les journaux opposés à Louis-Philippe furent condamnés au paiement de fortes amendes pour outrage au Roi, comme Le National, La Tribune et Le Charivari.

On note que le visage du roi n’est pas entièrement dessiné, afin d’éviter d’autres poursuites pour outrage.

Détail de la lithographie "Verse, verse, verse encore (scène bachique)" par Benjamin Roubaud pour la Caricature du 30 janvier 1834 - Jean-Charles Persil pressant des grappes de "raisin monétaire"

Jean-Charles Persil, Procureur général près la Cour royale de Paris, poursuiveur acharné des journaux républicains, est figuré en corybante (prêtre de la déesse Cybèle). Il presse, dans la coupe tenue par le Roi, les grappes de « raisin monétaire » ; les grains de raisin étant représentés par les chiffres du montant des amendes (2200, 24000,600…).

Derrière Louis-Philippe, également à cheval sur le coq, on aperçoit Ferdinand-Philippe, duc d’Orléans, son fils ainé, alors âgé de 24 ans, reconnaissable à son visage allongé, son collier de barbe et son bicorne. Affichant un air fort réjoui, il soutient son père, tout en retenant la ceinture de feuilles de vigne masquant le bas ventre royal.

Ferdinand-Philippe, prince libéral, populaire, périra tragiquement, le 13 juillet 1842, dans un accident de calèche.

En arrière-plan, on distingue Jean-Pons Guillaume Viennet, homme de lettres et poète, ami proche de Louis-Philippe. Une lyre à la main, assis sur un âne, il figure le dieu Silène, père adoptif de Bacchus, qui, en ivresse perpétuelle le suivait partout, en chevauchant un âne. Son intronisation sur l’âne de Silène est une allusion à sa visite, le 8 août 1833, à Estagel, dans les Pyrénées Orientales, au cours de laquelle il fit halte dans une auberge Les opposants politiques du lieu amenèrent devant l’établissement un troupeau d’ânes qu’ils excitèrent pour les faire braire tous ensemble. Cet épisode fit longtemps la joie de la presse d’opposition.

Enfin, sur le devant de la scène, Madame (ou Mademoiselle) Adélaïde d’Orléans, sœur cadette du roi, et sa précieuse conseillère, déguisée en ménade, ou bacchante, esquisse un pas de danse tout en s’enivrant d’un verre de cerises à l’eau-de-vie qu’elle tient de la main droite. Madame Adélaïde était réputée pour ses connaissances gastronomiques et son goût pour les fruits accommodés à l’eau-de-vie, notamment les cerises.

Venons-en au titre de la lithographie « Verse, verse, verse encore ». L’expression se retrouve dans plusieurs chansons anciennes, ainsi que dans la comédie-vaudeville de Scribe et Warner, « Les Moralistes », créée en 1829, dont Benjamin a pu s’inspirer.